La Ruche, le réseau en action des femmes francophones de Shanghai 

24 avril 2014 - Rencontre avec Anne Séverin, responsable du bureau de Shanghai pour DS Avocats

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« Depuis 17 ans, j'aide des entreprises occidentales à s'implanter à Shanghai. »

 

Le premier contact d’Anne Séverin avec la Chine date du lycée, avec ses premiers cours de chinois dispensés par sa prof de latin ! C’est un coup de cœur immédiat et, après le bac, Anne quitte Bordeaux pour enclencher un double cursus en droit et langues orientales.

Anne découvre son employeur très jeune, à l’occasion d’une conférence donnée aux étudiants. DS Avocats est alors l’un des deux seuls cabinets français qui disposent d’une antenne en Chine, à Pékin. Pour Anne, c’est l’opportunité professionnelle rêvée puisqu’elle permet de faire enfin le lien entre ses deux cursus.

Elle commence chez DS Avocats par des affaires chinoises traitées depuis Paris. Pendant près de 18 mois, la frustration de ne pas être sur place grandit. Le bureau de Pékin est malheureusement complet en terme de ressources humaines mais DS Avocats propose à Anne d’ouvrir un nouveau bureau à Shanghai. C’est le début de l’aventure chinoise. Avec le recul, Anne nous confie que la Chine a tellement changé depuis 17 ans que finalement c’est ce qui ne bouge pas qui devient le plus remarquable !

Au début des années 90, la Chine dispose de règlementations squelettiques en comparaison aux nombreux textes qui régissent le droit français. Et c’est bien là une opportunité professionnelle fantastique puisque « faire jurisprudence », le summum pour les avocats, est une ambition tout à fait possible. Anne aura ainsi pu contribuer à l’évolution du contrat « type Fesco » dont les clauses sont fixées par le gouvernement Chinois pour plusieurs années par l’équivalent d’un décret.

Si le droit chinois est réputé très imprévisible, c’est aussi une opportunité pour les entreprises. Grâce à un accompagnement personnalisé, les entreprises qui sauront faire preuve de souplesse et d’un niveau acceptable d’aversion au risque pourront tirer leur épingle du jeu. En Chine, la clé du succès pour une implantation d’entreprise c’est d’intéresser les administrations au projet ; c’est souvent plus une question de personne qu’une question de texte. Les chinois sont attachés aux récits ; ils savent apprécier les aventures humaines qui se cachent derrière un projet d’entreprise. Mais évidemment la situation évolue et les investisseurs étrangers sont de moins en moins marginaux.

Si le cabinet DS Avocats a accompagné au début en priorité les très gros groupes industriels, il peut aujourd’hui, en partie grâce à l’antenne Shanghaienne et à la libéralisation des marchés, conseiller également des entreprises plus petites dans des secteurs économiques variés. Pour DS Avocats, le facteur clé c’est avant tout la volonté des personnes qui portent le projet. DS Avocats a, par exemple, accompagné en 2007 le projet d’une des adhérentes de La Ruche, Elodie Abbé, qui a créé une société de conseil sur la formation interne (http://www.elodieabbeconsulting.com/fr). La difficulté dans le cas d’Elodie a été de trouver un district qui accepte un capital social inférieur à 140k$ pour le montage de sa WFOE. Cette contrainte de capital minimum est désormais levée grâce à l’évolution de la réglementation au 1er mars 2014,bien que certains districts continuent à la pratiquer... C’est, par exemple, le cas de Jing’an où sont privilégiées les enseignes de luxe et qui demande encore aux WFOE de disposer d’un capital de 200k€ ! Mais globalement, monter une société en Chine est devenu bien plus facile qu’avant, comme en témoigne aussi l’ouverture récente d’une zone franche à Pudong dans laquelle les entreprises ne se voient pas imposer de capital social minimum et délais de libération des capitaux.

Si les procédures se simplifient, la concurrence est aussi plus forte qu’auparavant, et il vaut mieux se lancer dans les secteurs les plus porteurs. Pour Anne, les activités relatives à la sécurité des personnes et des biens (sécurité alimentaire, de l’environnement, des données), à la santé, à la formation et l’éducation professionnelle, sont les plus à même de réussir. Le « made in France » est de plus en plus reconnu également, du fait du rejet des marques d’ultra-luxe, trop imitées, et d’un goût croissant pour les produits de qualité.

S’il n’y a pas de recette magique pour réussir le développement de son business en Chine, Anne invite toutefois à faire preuve d’humilité dans son projet. Une ambition modérée doublée d’une stratégie bien claire aide à tenir le cap. Les capacités d’adaptation des chefs d’entreprise sont souvent hyper sollicitées en Chine ; c’est pourquoi il faut bien savoir où l’on veut aller pour ne pas perdre le fil. Une erreur classique consiste, par exemple, à baisser la qualité de son produit, or un produit de moindre gamme ne se commercialise pas suivant la même stratégie…

Beaucoup d’entrepreneurs s’inquiètent de ce que l’on nomme la « zone grise ». Elle existe. Il est difficile de ne pas y être confronté. Dès lors, il convient de changer le regard que l’on pose sur celle-ci. Anne, elle-même, a été pendant plusieurs années « consultante » avant de pouvoir obtenir la licence lui permettant de faire valoir ses qualités d’avocat. Il faut considérer cette « zone grise » comme une zone d’opportunité et ne pas croire que le maintien par les autorités de ce flou réglementaire vise à discriminer les entreprises étrangères. Cette zone grise s’explique surtout par l’absence de culture du droit privé dans un pays où toutes les entreprises étaient il y a encore peu de temps publiques.

Autre spécificité chinoise, la gestion des contentieux. En effet, rien n’étant plus imprévisible qu’un tribunal chinois aux pratiques parfois très extravagantes, les contrats prévoient de préférence de recourir en cas de litige à des cours d’arbitrages qui ont le mérite de préserver la confidentialité des débats. Il ne faut pas voir pour autant dans ces arbitrages un magnifique exemple de médiation mais un simple moyen de contourner le refus de juger des juges !

Aujourd’hui DS Avocats Shanghai est reconnu comme étant LE partenaire juridique français privilégié, invité d’honneur du barreau de Shanghai, seul cabinet français représenté parmi les 14 internationaux. Une réussite qui tient, d’après Anne, beaucoup à la stabilité de son équipe dont les plus anciens partenaires sont à ses côtés depuis plus de 14 ans. Pour les entreprises, cette stabilité est également extrêmement précieuse. Les DG des sociétés changent et se succèdent mais DS avocat dispose de tout l’historique.

Pour conclure, Anne nous révèle qu’être une femme a été un grand atout durant tout son parcours. Il n’y a pas de machisme en Chine et les femmes directrices y sont encouragées et respectées. Alors osez, chères adhérentes, puisque votre féminité est une corde de plus à votre arc !

 

 

http://www.dsavocats.com/index.php4

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